Compte rendu

Les Prix Boels

Prix Boels

par Hani MADANI
Vice-Président de la Conférence du jeune barreau de Bruxelles
Avocat au barreau de Bruxelles

Cela fait près de 75 ans que le Prix « Georges Boels » existe.

Près de 75 ans que les stagiaires passent sous les fourches caudines d’un jury exigeant afin de satisfaire l’une de leurs plus importantes obligations de stage : l’exercice de plaidoirie.

Près de 75 ans que ce même jury sélectionne une poignée de stagiaires qui auront démontré leur engagement, leur talent et leur capacité à défendre avec force et conviction un cas, pourtant fictif.

Près de 75 ans que cette poignée de stagiaires s’affrontent lors du prestigieux concours d’éloquence, Georges Boels.

En cette année judiciaire 2024-2025, ils sont 294 à avoir été attentivement lus et surtout entendus.

Le 14 avril 2025, ils n’étaient plus que huit lors de la finale présidée par le vice-président, Me Karim Sedad, entouré d’un jury composé d’orateurs de très haute qualité qui aura la lourde tâche de retenir deux lauréats. 

Autant vous dire que la pression est grande.

La salle est comble.

La famille, les amis et les maitres de stage sont tendus, mais déjà fiers.

Pour cette édition, la formule est toutefois nouvelle : les candidats sont en principe invités à reproduire leur plaidoirie, mais Me Sedad a décidé de proposer aux participants de démontrer leur talent sur base de sujets proposés, à traiter par la négative ou l’affirmative.

Les voici : « Le taux horaire est d’or, le silence aussi ? », « Peut-on avoir les Boels en perdant ? », «Doit-on plaider ce qu’on peut remettre à deux semaines ? », « Un bon stagiaire en vaut-il deux ? ».

Ce dépoussiérage est le bienvenu, et nul doute que le prochain vice-président de la Conférence du jeune barreau sera avisé de s’en inspirer. 

Parlons sans fard, les candidats ont brillé et pour autant que de besoin justifié leur légitimité.

La salle a ri, la salle a voyagé et la salle a été attentive à des discours engagés.

Me Laura Senturk1 a décidé de discourir en ne remettant pas à deux semaines sa plaidoirie pour une justice plus humaine, plus vivante et moins mécanique, car il y a urgence à plaider, urgence à agir !

Heureusement d’ailleurs qu’elle n’a pas demandé la remise, puisque le siège lui a été favorable ; félicitation à elle !

Me Thomas Martens2 a décidé de nous faire voyager : l’audience est transportée à Rome, en l’an 62 av. J-C, et breaking news : Cicéron est à la recherche d’un stagiaire. D’un stagiaire qui en vaut deux, mais qu’il ne paiera en revanche que comme un !

Comme quoi, ça a toujours existé…

Me Gabrielle Mathues3 a les boules et elle invite tous ceux qui les auraient aussi à rejoindre son ASBL « CBA » : le club des boulets anonymes.

The loser takes it all, the winner’s standing small. Tel est leur B-ABBA ! Me Mathues a brillé et elle a démontré qu’effectivement le clivage entre les gagnants et les perdants était finalement vain.

Me Necim Triki4 a aussi les boules, mais il est : « venu pour défendre les perdants ». Sa voix a raisonné, et son ton a porté. L’audience était subjuguée. D’ailleurs, défendre les perdants, en quelle qualité ? Celle de gagnant ? Quelle ironie ! Félicitation à lui.

Me Célia Scliffet5 prévient d’emblée : elle déteste perdre.

C’est vrai, qui aime ça ? Me Scliffet nous livre toutefois un propos philosophique empreint de sagesse – qui en toute franchise raisonne en votre serviteur – la défaite n’est pas une finalité en soi, la roue tourne et ce qui est important c’est de savourer tous les moments, d’apprendre de l’échec, et d’y retourner.

Pour cette leçon, merci !

Me Alida Shpati6 donne le ton : elle est indignée ! Indignée par l’état de notre Justice ; du manque de magistrats, du manque de moyen alloué à la justice, et de la ruine de notre palais de justice. Son discours est engagé. Son discours sonne juste et fait écho dans l’esprit de l’audience.

Merci pour ce précieux rappel.

Me Michele De Risi7 évoque un stagiaire qui porte en lui deux vies : celle d’avant, faite de convictions, et celle d’après, où il apprend à les transformer en action. Ce passage, il ne le subit pas, il le façonne. Et c’est cette capacité à faire de son histoire une force qui, selon lui, double sa valeur.

Merci pour cette vision forte et incarnée.

Me Kelian Rask8 a pris la parole, au sein d’une salle d’audience, lors d’un concours d’éloquence, en évoquant le coup de boule de Zizou. Rien que pour cela, merci. Le ton était juste et la plaidoirie assumée. Prenez garde en revanche : ne lui parlez pas de sa maman.

À l’unanimité, cette finale était d’une grande qualité.

Les candidats ont tous chaleureusement été félicités pour l’indéniable qualité de leurs prestations, leur courage et leur détermination.

Nul doute que l’avenir de la profession est entre d’excellentes mains.